Partager:
Yannis a raté les trois premiers mois de l’année scolaire. En cause ? Les bus scolaires n'avaient pas la possibilité de passer le prendre à son domicile. Actuellement, il vient seulement de commencer les cours grâce à une solution… très coûteuse. Explications.
La rentrée scolaire, c’était il y a trois mois. Pourtant,Yannis vient seulement de retrouver le chemin de l'école en ce mois de novembre. Ce garçon de treize ans est atteint du syndrome de Goldenhar, une maladie caractérisée par des malformations de l’appareil auditif et oculaire. Pour poursuivre sa scolarité, il doit se rendre dans un établissement d'enseignement spécialisé à son handicap.
L'école la plus proche se trouve à Uccle, à Bruxelles. Pour cela, un bus vient le chercher quotidiennement à son domicile pour le déposer à l'école. Mais problème : aucune solution de transport n'avait été trouvée pour la rentrée 2024.
"On est dans une école où les élèves ont potentiellement des difficultés supplémentaires, donc leur présence régulière est indispensable. Les parents ont fait tout ce qu’ils pouvaient pour essayer de ne pas le perdre dans les apprentissages. Mais seul à la maison, il n’y a rien à faire, il manque la manipulation en termes de travail", explique Valérie Dekijzer, professeure à l'IRSA.
On nous laisse perdu dans la nature
Aujourd'hui, une solution vient d’être trouvée : un transport privé va le conduire tous les jours, aller et retour. Son école est située à plus d’une heure de route de son habitation, à Somzée, où sa mère l’attend.
Cette dernière est soulagée d’avoir trouvé une solution, mais reste impuissante face au temps perdu : "On nous a promis de faire le nécessaire, mais ça n’a jamais été fait. (...) C’est inadmissible. Ce n’est pas possible qu’un enfant reste trois mois sans école, sans rien. On nous laisse perdus dans la nature. Si je ne fais pas les démarches, personne ne vient vers moi".
"Le monde politique doit prendre ses responsabilités"
Il existe cinq écoles spécialisées pour le type de handicap de Yannis : à Liège, à Mons et en région bruxelloise. Aucune d'entre elles ne se situe proche de chez lui, mais son handicap lui donne droit au transport scolaire. Un service qui - selon la directrice de l’école de Yannis - n’est pas suffisamment efficace. Il est fréquent que des bus soient annulés par manque de chauffeurs.
Chaque jour, il y a 20, 30 ou 40 élèves qui sont privés d’école
"C’est encore problématique, puisque la situation de Yannis est loin d’être un cas isolé", assure ainsi Chimène Dhainaut, directrice de l'IRSA. Lorsqu'un chauffeur est absent, ce dernier est rarement remplacé. Conséquence : le bus n'effectue tout simplement pas ses trajets.
"De manière générale, chaque jour, il y a 20, 30 ou 40 élèves qui sont privés d’école en raison de ces remplacements qui sont difficiles. Je pense aussi que la COCOF fait face à des contraintes budgétaires, ce n’est clairement pas suffisant pour assurer ce transport de manière quantitative et qualitative", ajoute-t-elle. "Ce sont clairement les droits les plus fondamentaux de ces jeunes handicapés qui sont bafoués. Et là, c’est le monde politique qui doit prendre ses responsabilités".
Le cas de Yannis coûte cher : 420€ par jour de transport, soit près de 80.000€ par an. Cela représente presque 1% du budget annuel total. "Chaque situation est différente, donc on doit avoir une solution adaptée à la réalité. Avoir recours à un taxis privé, ça coûte très cher à la collectivité, c’est donc une mesure qu’on prend si on n’a pas d’autres alternatives", assure ainsi Emmanuel Baufayt, chef de service du transport scolaire à Bruxelles.
À Bruxelles, 5.000 enfants sont transportés chaque jour vers les différentes écoles spécialisées.