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« Plus aucune limite » : des jeunes délinquants commettent des actes toujours plus graves, quelles réponses apporter ?

Par RTL info avec Benjamin Samyn et Sylvain Winance
Si le nombre de dossiers reste relativement stable, les jeunes délinquants commettent des faits de plus en plus graves. Souvent, ils sont en décrochage scolaire, livrés à eux-mêmes. Quelles sont les solutions pour répondre à ce phénomène de société inquiétant ?

Début juillet, à Tournai, trois jeunes s’en prennent violemment à un sans-abri, l’insultant et le blessant en lui jetant des pierres. Ils partagent la vidéo ur les réseaux sociaux. Avril 2024, à Dampremy, un mineur de 17 ans tue d’une balle dans le dos un jeune majeur qui en a 18 dans un contexte de drogue. Il y a six mois, des membres d’une organisation criminelle active dans le trafic de stupéfiants tirent au niveau de la station de métro Clémenceau à Anderlecht.

L’état des lieux est inquiétant. De plus en plus souvent, des mineurs ou des jeunes adultes sont impliqués dans des affaires extrêmement graves. Caroline Van Nieuwlandt est la chef adjointe de la section jeunesse du parquet de Bruxelles. Sur son bureau, les dossiers s’empilent. Chaque jour, elle traite des cas qui concernent des mineurs délinquants.

« Encore hier, un jeune de treize ans était impliqué dans un vol avec violence avec une victime de 13 ans tabassée au sol, raconte Caroline Van Nieuwlandt. Ce sont des choses qu’on ne voyait pas spécialement avant. Et puis, de manière plus globale, c’est toutes les organisations criminelles qui sévissent à Bruxelles, avec des majeurs qui font usage de mineurs pour guetter, pour vendre ». Et la chef adjointe de la section jeunesse du parquet de Bruxelles de préciser que les personnes impliquées dans les fusillades ne sont pas « des gens de 50 ans », mais des jeunes.

Pour tenter de savoir comment ils glissent vers la délinquance. Nous avons rencontré Victor, aujourd’hui majeur, mais à 17 ans, il a passé plusieurs mois en IPPJ après avoir commis des délits. « On se sent seul et on a tendance à faire des dérives, confie Victor. L’IPPPJ, ça m’a fait du bien honnêtement, parce que j’avais un cadre, un entourage, des gens qui m’entouraient et ça m’a permis de voir vers où on peut créer un chemin ».

Nous rencontrons Solaÿman Laqdim, le délégué aux droits de l’enfant devant l’IPPJ de Saint-Servais. Il discute régulièrement avec des mineurs placés en institution. Ils sont souvent dans des situations délicates. « Aujourd’hui, on voit qu’il y a plein d’indicateurs qui sont rouges, constate-t-il. On a une famille sur quatre en Wallonie qui vit sous le seuil de pauvreté, une famille sur trois à Bruxelles qui vit sous le seuil de pauvreté. On a vraiment des situations qui se dégradent au sein des structures familiales. Et donc il faut d’abord agir sur ces aspects-là pour éviter le basculement et donc une approche préventive, bienveillante qui permet de faire en sorte que ces jeunes ne basculent pas.»

Des jeunes déstructurés, en perte de repères et souvent en décrochage scolaire. C’est le résultat d’un ensemble de problèmes. « On a des jeunes qui sont perdus, qui ne suivent plus, déplore Caroline Van Nieuwlandt. Et donc, qu’est ce qui se passe ? Ils brossent les cours, ils brossent les cours et donc on a des parents aussi qui sont quelque part démissionnaires, qui ne vont pas en fait suivre les enfants à la maison. Et donc, que font ces gosses ? On les retrouve en rue et donc ils vont en rue, ils vont traîner en rue, ils vont rencontrer de mauvaises personnes et donc par conséquent, on a une logique de quartier qui se met en place. Et donc ces jeunes vont être embrigadés. Et puis il y a l’attrait de l’argent facile. »

Une problématique qui est également accentuée par les réseaux sociaux. Sur cette vidéo postée sur Internet et tournée à Bruxelles, un jeune se filme alors qu’il tire sur des passants. « Il n’y a plus de limite. Nos jeunes ont perdu toute valeur, ont perdu tout sens, déplore L’avocat bruxellois Yannick De Vlaemynck. Il y a une recherche de statut, une recherche de reconnaissance sur les réseaux sociaux. Ils ne sont pas utilisés qu’à cette fin et sont également utilisés parce que ça permet d’avoir une recherche d’argent beaucoup plus facile, beaucoup plus rapide.

Quant au nombre de faits de délinquance chez les mineurs à Bruxelles, il augmente légèrement : plus 5 % entre 2023 et 2024 et plus 15 % de vols avec violence. Comment résoudre cette problématique ? Le système judiciaire dispose-t-il de suffisamment de mesures d’encadrement des mineurs ?

Nous avons posé la question à Olivier Mallinus, juge de la jeunesse depuis cinq ans. « Ça fait très longtemps que les juges de la jeunesse se mobilisent pour dire qu’il y a un manque de moyens qui est criant et qu’un certain nombre d’outils qui existent dans la loi pour essayer de casser cette dynamique délinquante, essayer de prévenir la récidive, ne peuvent plus être mis en œuvre. Donc il y a beaucoup trop de jeunes qui sont placés sur des listes d’attente en vue d’une mesure de placement ou d’autres mesures, des accompagnements au départ d’un milieu familial et qui, pour l’instant, restent lettre morte. Les jeunes reçoivent le message, ils ont été arrêtés. Mais très rapidement, ils sont de retour dans leur quartier et il y a un sentiment d’impunité qui est très grave car il conduit à la récidive. »

Certains estiment qu’il faut punir plus sévèrement les mineurs. Ce n’est pas l’avis de ce juge de la jeunesse. « Punir un mineur est une solution qui n’est pas adéquate, estime Olivier Mallinus. Punir, ce n’est pas le mot, par contre, éduquer et le cas échéant, avec des moyens extrêmement fermes, extrêmement stricts pour dire qu’on ne sera jamais d’accord avec ce type de comportement et qu’il faut pouvoir casser cette dynamique. Ça, je pense que c’est la bonne réponse à apporter ».

Et les acteurs de la justice le disent : un mineur délinquant qui n’est pas encadré correctement sera un major récidiviste.

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