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Diminuant le poids des patients jusqu’à 20 %, de nouveaux traitements anti-obésité révolutionnent la prise en charge des personnes en situation d’obésité sévère. C’est du jamais vu pour des traitements médicamenteux, mais il faut tout de même souligner leurs limites.
Ces médicaments, qui comprennent notamment le sémaglutide (Ozempic/Wegovy) de Novo Nordisk et le tirzépatide (Mounjaro) d’Eli Lilly, accentuent l’action d’une hormone, dite « glucagon-like peptide 1 » (GLP-1). Celle-ci agit sur la sécrétion d’insuline, ce qui explique que ces traitements aient d’abord été développés contre le diabète. Mais GLP-1 joue plus largement sur la sensation de satiété, via des mécanismes cérébraux.
Ces médicaments peuvent donc profondément changer le rapport des patients à leur alimentation, en réduisant leur appétit via une amélioration de leur capacité à être rassasiés.
Des médicaments révolutionnaires ?
Selon les spécialistes de l’obésité, il s’agirait d’une avancée historique pour aider à perdre du poids. Jusqu’alors, la chirurgie restait la principale thérapie proposée aux personnes dont l’obésité est sévère et résiste aux changements de mode de vie.
L’obésité était l’une des seules maladies chroniques pour lesquelles il y avait très peu de médicaments.
Ces nouveaux traitements « couvrent un besoin majeur non couvert : l’obésité était l’une des seules maladies chroniques pour lesquelles il y avait très peu de médicaments », explique à l’AFP Emmanuel Disse, endocrinologue aux Hospices civils de Lyon. Lors des essais cliniques, ces médicaments ont diminué en moyenne de 15 % à 20 % le poids des patients. C’est légèrement moins que la chirurgie, mais c’est du jamais vu pour des traitements médicamenteux, par essence moins invasifs.
Un progrès scientifique, mais pas magique
Les experts sont cependant unanimes : les GLP-1 ne sont pas des molécules miraculeuses. En premier lieu, ils causent fréquemment des effets secondaires. En revanche, il est permis d’affirmer que les effets graves sont plutôt rares contrairement à de précédents médicaments coupe-faim.
Une vaste étude, réalisée à partir des données de santé de centaines de milliers de vétérans américains et publiée en janvier dans Nature Medicine, montrait que les GLP-1 ne sont pas associés à un risque accru de troubles cardiaques ou d’idées suicidaires, comme cela avait été précédemment avancé. Mais, quelques risques graves, comme des atteintes au pancréas, existent de façon limitée. Et ces médicaments causent souvent des effets pénibles comme des nausées, des troubles du sommeil, ou encore des migraines, qui ne sont pas graves en soi, mais qui peuvent être insupportables pour les patients.
Les GLP-1 ne marchent par ailleurs pas à tous les coups : certains patients ne perdent pas de poids. Leurs effets ne perdurent pas en cas d’arrêt, ce qui en fait des traitements à vie. Et, pour l’heure, ils ne s’administrent que sous forme injectable, alors qu’une pilule rendrait leur prise bien plus aisée.
La liste des bénéficiaires est limitée
À cause de ces limites, les GLP-1 doivent être réservées aux personnes dont le surpoids est important, et dans le cadre d’une prise en charge plus large de leur obésité : activité physique, changement de régime…
Toutes les autorités ne mettent pas le curseur au même endroit : la France les recommande pour un IMC supérieur à 35, alors que les États-Unis n’ont mis la barre qu’à 30. Les experts interrogés par l’AFP pointent qu’il s’agit probablement d’un choix économique, et non seulement médical. La France, dont le système de Sécurité sociale rembourse de nombreux traitements avec de l’argent public, se montre logiquement plus restrictive.
Pour la suite
« On ira vite vers des médicaments plus efficaces, avec moins d’effets secondaires, moins chers, et plus simples à prendre », résume à l’AFP Steven O’Rahilly, directeur de l’Institut des sciences du métabolisme à l’Université de Cambridge. « Mais la difficulté risque d’être de combiner ces quatre facteurs dans un seul traitement. »
L’arsenal thérapeutique est déjà en train de se compléter. Publié samedi dans le Lancet, un essai clinique encore en phase précoce, montre que l’amycrétine, une molécule proche des GLP-1 mais au fonctionnement un peu plus large, pourrait être encore plus efficace.
Une autre grande piste de recherche concerne de nouvelles applications de GLP-1 en dehors de l’obésité : ils semblent liés à des améliorations dans de nombreuses pathologies, comme les démences ou les addictions. Reste à savoir s’il s’agit d’un effet direct de ces médicaments, ou de bénéfices liés à l’amélioration du diabète ou de l’obésité.

















