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Vous avez été nombreux à être touchés par l'histoire d'Esther, qui s'est portée garant pour le crédit d'un ami, et qui se retrouve à devoir rembourser des mensualités conséquentes puisque ce dernier n'est pas solvable
Plus de 1.000 euros partent chaque mois du salaire d'enseignante d'Esther, qui nous a contactés, desespérée, puisque ses multiples démarches pour se défaire de ce crédit sont vaines. "On me retire cet argent pour payer ses dettes à lui", se désole notre alerteuse. En effet, il semblerait que celle-ci ne soit pas simplement la garante de son "ami" mais sa co-débitrice, ce qui signifie qu'elle est davantage engagée dans le remboursement des 80.000€ contractés. Il lui est donc d'autant plus compliqué de se retirer de la procédure.
Aurore Baraillon, juriste contactée dans le cadre de notre enquête, nous expliquait dans un article précédent."Si deux personnes signent un crédit, elles s’engagent toutes les deux à rembourser le prêt de manière solidaire et indivisible. En cas de problème, le créancier va se tourner vers la personne la plus solvable. Le fait que madame ait signé quelque chose qu’elle n’a pas compris n’est pas valable juridiquement".
Pour cette dernière, les solutions pour Esther sont restreintes et difficiles à concrétiser. Il faudrait qu'elle attende que le règlement collectif de son ami arrive à terme afin de pouvoir intenter une action en justice et demander à ce qu'il paie la moitié de la somme (80.000 euros).
Pablo Salazar est juriste. Il travaille au Centre de référence en matière de médiation de dettes pour la Province de Liège, le "GILS". Il a contacté la rédaction de RTL info afin d'apporter quelques lumières sur le cas d'Esther.
La médiation au CPAS
Selon Pablo Salazar, le premier réflexe en cas d'endettement ou de surendettement est de se rendre au CPAS et dans le service dédié à la médiation de dette. "L'aide est gratuite et accessible à tout le monde", précise le juriste. Dans cette médiation qui existe dans tous les CPAS (ou dans un regroupement de CPAS), on retrouve un travailleur social épaulé par un juriste. Le médiateur va donc "traiter avec tous les créanciers en même temps s'il y a plusieurs prêteurs". Le "juriste va le conseiller, voir si y a pas des procédures contestables ou des cas d'illégalité". Mais Pablo Salazar met en garde: "On pense parfois que le CPAS va payer les dettes. Ce n'est pas le cas, il aide à trouver des solutions".
La situation de notre alerteuse est somme tout plus compliquée à gérer et à négocier à l'amiable, puisqu'elle n'a qu'une dette et qu'elle est élevée.
Le Règlement collectif de dettes (RCD)
Contrairement à ce qui a été supposé précedemment, Esther a bien bien le droit de faire un RCD et celui-ci ne présenterait aucun conflit d'intérêts. "Le Réglement collectif de dettes est une procédure judiciaire devant le tribunal du travail. On lui a proposé d'être créancière pour récupérer des sommes déjà payées. Cela ne l'empêche pas d'avoir un recours à RCD, il n'y a pas donc aucun empêchement."
Pour précision, le RCD est une médiation de dettes judiciaire gérée par un médiateur de dettes afin de proposer un plan de paiement au créancier. Le RCD s'étale sur sept années. "Si on arrive pas à tout payer en sept ans, le médiateur peut proposer de ne payer qu'une partie", explique Pablo Salazar. "En gros, on paie tout ce qu'on peut payer pendant sept ans et au bout de ce délai, la dette est effacée." Les conditions d'accès à ce RCD sont simples et rapides à mettre en place: elle se base surtout sur la bonne foi du demandeur. "Par exemple, il ne faut ne pas avoir organisé sa non solvabilité, il faut collaborer, ne pas cacher ses activités professionnelles et ses revenus..." Esther pourrait, par exemple, dégager 300 à 400 euros par mois pendant sept ans. Elle n'arriverait pas à 80.000€ mais elle serait protégée par ce RCD. Ainsi, elle n'aurait plus de saisie sur salaire, par exemple. "Elle serait comme dans une bulle pendant la procédure."
Le rééchelonnement
Si Esther ne peut pas ou ne souhaite pas de RCD, elle peut envisager de rééchelloner ses mensualités. "Quand on a une aggravation de la solvabilité, c'est-à-dire si notre capacité financière entre le moment de contracter le crédit et aujourd'hui est différente, on peut rééchelonner son crédit." Ainsi, les mensualités seraient revues et abaissées en fonction des capacités de paiement. Attention, cela ne s'assimile pas à un rachat de crédit. "Il s'agit du même crédit dont les termes sont renégociés." Notre juriste précise cependant que les créanciers ne sont pas toujours au fait de cette possibilité.
Une plainte auprès de l'Ombudsfin
Esther peut déposer une plainte gratuite auprès l'Ombudsfin qui est une "espèce de 'super médiateur'", nous indique Pablo Salazar. Mais attention: son rôle est étatique et non judiciaire. Esther pourrait raconter son affaire à l'Ombudsfin qui ensuite pourrait contacter le prêteur. L'Ombudsfin rendrait alors un avis qui serait un faire valoir devant un juge.
Rester alerte
La dernière solution pour Esther est surveiller le RDC de l'autre débiteur. "Il est possible que lui bénéficie d'une remise de dettes, ce qui vaut aussi pour l'autre co-débiteur. Elle pourrait donc potentiellement en bénéficier."
Il existe des recours pour récupérer de l'argent auprès du co-débiteur et elle pourrait réclamer d'être remboursée mais il s'agirait là d'une autre chambre.
Esther pourra-t-elle un jour récupérer les mensualités qu'elle a payées?
Juridiquement, l'alerteuse est impliquée dans ce crédit, elle est donc tenue de payer. "Si elle a signé, malheureusement elle s'est engagée, cela aurait du être mieux communiqué entre les éditeurs", précise Pablo Salazar. "Esthers'est peut être fait rouler mais ça ne concerne pas le créancier..."
Esther pensait être garante et se retrouve co-débitrice: est-ce légal?
Le prêteur doit informer les débiteurs. Il doit les informer sur les obligations ainsi que sur les conséquences. "Normalement ça aurait dû être dit qu'elle était codébitrice", mais pour notre juriste, Esther a également sa part de responsabilité. "Qu'elle soi co-débitrice était forcément écrit sur le contrat. Mais, c'est vrai, ce n'est jamais écrit en très grand..."