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Laëtitia, enseignante dans un établissement scolaire de la province de Namur, se dirige vers une nomination, mais avec la réforme annoncée par Valérie Glatigny, pourrait-elle modifier ses plans ? Le cabinet de la ministre francophone de l'Éducation fait le point sur la situation.
Laëtitia est institutrice depuis 9 ans dans une école de Philippeville, dans la province de Namur. Face aux réformes annoncées pour la rentrée 2027, avec l'arrivée du contrat à durée indéterminée (CDI) dans son secteur, l'enseignante se pose des questions quant à sa situation.
En bonne voie pour être nommée dans une classe de maternelles, Laëtitia n'est pas encore assurée d'obtenir ce statut.
"En novembre dernier, j’ai été nommée 1 période sur 26. Ma question est donc la suivante : 'Est-ce que j'aurai la possibilité d’étendre ma nomination à l’avenir, ou serais-je concernée par le contrat CDI ?'", s'interroge-t-elle.
Elle poursuit: "Une période représente une heure. Le temps plein d’une institutrice maternelle, ce sont 26 périodes (heures), et ici, j’ai été nommée pour une seule période. Il me reste donc 25 périodes à obtenir pour être nommée à temps plein. Comme j’ai été nommée une heure, je me demande s’il y aura encore la possibilité d’être nommée pour mes autres heures, si ça n'est pas fait avant la réforme de 2027. Vu qu’il me reste encore des heures pour être nommée, et comme j’ai déjà un pied dedans, je me demande si je fais partie de l’ancien système, ou du prochain système."
Qui peut prétendre à une nomination à titre définitif?
Entre le CDI et une nomination, Laëtitia a fait un choix clair.
"Je suis encore de l’ancien système, je préfère la nomination, pour la sécurité financière, c’est quand même mieux. J’ai une vraie préférence pour la nomination", souligne-t-elle. "Pour les jeunes enseignants, le CDI peut être bien, mais pour ceux qui travaillent déjà depuis quelques années… Comme je me suis battue pour la nomination jusqu’à présent, je trouverais dommage d’aller vers la suppression des nominations. Comme j’accumule des jours dans cette école, si une collègue part à la pension, la place doit me revenir. Mais mes collègues ne sont pas près de prendre leur pension, ça sera dans 5-6 ans. Depuis que je suis sortie des études, je retravaille dans cet établissement chaque année. J’ai fait des remplacements ailleurs, mais je reste principalement dans cette école."
Une période de transition sera prévue
À quoi peut s'attendre Laëtitia avec la réforme annoncée en 2027? Nous avons posé la question à Johanne Moyart, la porte-parole de Valérie Glatigny, la ministre francophone de l'Éducation.
"Nous ne pouvons pas donner une réponse à un cas particulier en l’état actuel des choses. Aucun texte n’existe à ce stade, sachant que le Gouvernement n’est en place que depuis 5 mois. La réflexion sur la mise en place d’un CDIE (CDI spécial "Enseignant") est en cours pour aboutir à un texte qui devra suivre le cours normal d’un texte législatif : concertation avec le secteur de l’enseignement, passages en Gouvernement, avis du Conseil d’Etat, passage pour adoption au Parlement", précise la porte-parole.
L'objectif de Valérie Glatigny est que les jeunes enseignants sortant de la formation initiale d’enseignant en 4 ans, au lieu de 3 ans auparavant (cohorte 2026-2027), puissent bénéficier de ce CDIE en 2027. "Ce CDIE s’accompagnerait d’un 2e pilier de pension, d’une valorisation barémique et d’un aménagement de début et fin de carrière. Pour les enseignants déjà nommés, rien ne change. Ils sont et resteront nommés."
Pour les enseignants sur le point d’être nommés (comme Laëtitia), "une période de transition sera prévue pour leur permettre d’obtenir leur nomination ou, si tel est leur souhait, opter pour le CDIE. Mais nous ne sommes pas en mesure d’annoncer aujourd’hui de quelle durée sera cette période de transition. Ce qui sera quoiqu’il en soit, concerté avec le secteur", conclut Johanne Moyart.
Le paquet de réformes prévoit notamment une rémunération plus élevée pour les enseignants formés en quatre ans, l'aménagement des débuts et fins de carrière et la rémunération des stagiaires en quatrième année.
"On proposera un paquet de mesures par rapport à la pension, aux congés maladie, à la progression dans la carrière pour que tous les avantages de la nomination soient préservés. Pour ceux qui sont déjà nommés, il n'y aura aucun effet rétroactif bien sûr", précisait Valérie Glatigny fin septembre.
La ministre considère que certains enseignants demanderont à changer de système quand ils verront ce qui est proposé dans le paquet CDI.
Pour Valérie Glatigny, le CDI pour remplacer la nomination représente par ailleurs une solution à la pénurie actuelle. "C'est un contrat sur mesure avec un deuxième pilier de pension sans perte de droit. Ça, c'est très important. Et pourquoi on veut faire ça ? Pour stabiliser les jeunes enseignants, sachant qu'un jeune enseignant sur trois va quitter le métier dans les cinq ans", assurait-elle dans le 7h50 de Bel RTL.
Selon Valérie De Nayer, secrétaire communautaire CGSP Enseignement, un CDI n'assure pas la stabilité et ce changement de statut va coûter plus cher, car les calculs "prennent en compte le surcoût des cotisations sociales et le financement d'un second pilier de pension". "Un enseignant CDI va coûter entre 25% et 33% plus cher qu'un enseignant nommé. Donc on ne comprend pas pourquoi Mme Glatigny s'acharne à vouloir absolument engager des enseignants sous forme de CDI alors que ça coûtera plus cher à la Fédération. Alors que dans le même temps, elle fait voter des décrets programmes où elle réduit les moyens de l'école, entre autres de l'enseignement qualifiant. Donc pour nous, ce n'est pas compréhensible et c'est sans doute idéologique comme posture", déplorait le syndicat à mi-janvier.
Les deux jours de mobilisation organisés par les syndicats les 27 et 28 janvier sont le signe d'un mécontentement du secteur qui ne faiblit pas depuis quelques mois.