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« L’éleveur a caché ce problème, c’est honteux » : Eliana découvre que son chiot souffre d’une anomalie congénitale

Par Julie Duynstee
Six mois après l’achat de son chiot, Eliana apprend qu’il souffre d’une anomalie congénitale nécessitant une opération coûteuse. Cette habitante d’Evere déplore que l’éleveur n’ait pas mentionné ce problème dans le contrat de vente. De son côté, l’animalerie assure avoir respecté la réglementation en vigueur.

Eliana a acheté un chiot chez un éleveur situé en périphérie bruxelloise. Six mois plus tard, fin novembre, cette habitante d’Evere est inquiète. Le jeune bichon maltais, nommé Dobby, présente des « signes de malaise ». Préoccupée, la propriétaire consulte un vétérinaire en urgence. « Il a diagnostiqué une cryptorchidie du testicule droit, une anomalie congénitale nécessitant une intervention chirurgicale urgente pour éviter des complications graves », assure la Bruxelloise. Eliana décide alors de procéder à cette chirurgie et paie un peu moins de 400 euros de frais.

Après cette opération, elle réalise des recherches en ligne et découvre des témoignages similaires. « Je me suis rendu compte que je n’étais pas la seule victime. Plus de 30 propriétaires ont signalé des maladies graves, congénitales de leurs chiens provenant de cet élevage », rapporte la Bruxelloise. « Il apparaît également que ces chiens sont importés de Tchéquie, Slovaquie, Hongrie. Ce qui complique sérieusement la traçabilité sanitaire et vaccinale », ajoute-t-elle.

De réelles usines à chiots

Face à cette situation, Eliana a décidé de nous contacter via le bouton orange Alertez-nous pour mettre en garde contre certains élevages qu’elle qualifie de « réelles usines à chiots ».

Une vétérinaire confirme des problèmes réguliers avec des animaux qui proviennent des pays d’Europe de l’Est. « En général, ce ne sont pas des élevages familiaux et les animaux ont souvent des maladies car ils vivent dans des conditions abominables », indique Justine Sohier.

Des pathologies juvéniles et des animaux trop jeunes ?

Dans son cabinet situé à La Louvière, elle soigne parfois des chiens ou des chats qui présentent des soucis similaires. « En consultation, je le vois directement. Il y a quasiment toujours une falsification au niveau de l’âge du chiot. Les vétérinaires sur place trichent pour pouvoir les vacciner plus tôt. On peut le détecter en examinant les dents et le poids par exemple », assure la vétérinaire.

Selon elle, ces chiots souffrent la plupart du temps de pathologies juvéniles, comme la toux du chenil ou la giardose, un parasite intestinal qui provoque des troubles digestifs importants. « Tous les chiens qui viennent de ce genre d’animaleries, quand on les teste, ils présentent ce genre de maladies ».

L’animalerie dément

La responsable francophone de l’élevage incriminé par Eliana réfute ces accusations « L’âge des chiots est communiqué par les éleveurs et certifié par trois vétérinaires agréés, sur place et ici. Les dates de naissance figurant dans les passeports sont établies par ces vétérinaires. Nous n’avons aucun pouvoir pour les modifier ou les contester », assure-t-elle, en remettant en cause la détection de l’âge via la dentition.

Concernant la vaccination, la responsable affirme que « toutes les vaccinations obligatoires en Belgique sont effectuées en respectant les schémas recommandés, qu’il s’agisse de chiots belges ou importés ».

La responsable déplore la qualification d’« usine à chiots ». « C’est un terme diffamatoire et injuste. Nous travaillons avec des éleveurs professionnels contrôlés, belges et étrangers, soumis aux mêmes exigences. Nos animaux sont suivis par des vétérinaires, bien nourris, socialisés et soignés ».

« Et contrairement aux idées reçues, les chiots importés nous coûtent plus cher que les chiots belges. Nous y avons recours uniquement pour certaines races qui ne sont plus ou très peu élevées en Belgique », ajoute-t-elle.

Le contrat de vente ne mentionnait en aucun cas ce défaut

Quoi qu’il en soit, Eliana estime avoir été lésée par l’animalerie. Pour elle, l’éleveur aurait dû déclarer l’anomalie au moment de l’achat. « Le contrat de vente ne mentionnait en aucun cas ce défaut. C’était caché, c’est honteux », regrette la propriétaire. « Si un chiot possède un testicule dans l’abdomen, un problème héréditaire détectable dès le premier vaccin lors de l’examen général, cela doit figurer sur le contrat de vente », confirme la vétérinaire Justine Sohier.

« Comme le prévoit la garantie légale, j’ai donc contacté l’élevage pour demander le remboursement de ces frais. Mais celui-ci a refusé », déplore la propriétaire.

En quoi consiste cette garantie légale ?

Depuis mai 2024, de nouvelles règles de garantie spécifiques aux animaux vivants sont en vigueur. « Dans le cadre du régime de garantie légale, tout vendeur professionnel d’un animal est responsable envers le consommateur de tout défaut de conformité de cet animal qui se manifeste dans un délai d’un an à compter de l’achat. Il s’agit d’une obligation légale », indique Etienne Mignolet, porte-parole du SPF Économie.

Il y a défaut de conformité lorsque l’état de l’animal ne correspond pas à ce qui a été convenu dans le contrat ou à ce que le consommateur peut raisonnablement attendre. Il s’agit donc aussi bien de problèmes de santé chez l’animal (par exemple, maladies contagieuses, anomalies congénitales, etc.) que de caractéristiques de l’animal qui s’écartent de ce qui a été convenu lors de la conclusion du contrat (par exemple, âge, sexe, couleur).

« Il est toujours possible d’acheter un animal présentant une anomalie/un problème de santé connu, mais le consommateur doit alors avoir donné son accord explicite et séparé au préalable. Il appartient au vendeur d’en apporter la preuve », précise le porte-parole.

Dans le cas de Dobby, l’animalerie ne conteste pas le fait que le problème n’a pas été signalé au moment de la vente. « Ce chiot avait bien un testicule manquant. Un seul était descendu. Ce n’était pas mentionné sur le contrat, c’est exact. Nous ne l’avons pas détecté lors de l’achat », concède la responsable.

Dans ce genre de situation, le vendeur doit proposer une prise en charge chez un de ses vétérinaires. Une consultation et une opération à ses frais. « Ou, si le client veut absolument passer par son vétérinaire, un remboursement des frais à concurrence de ce que cela nous coûterait chez nos vétérinaires est octroyé », indique la responsable.

Alors pourquoi l’animalerie a-t-elle refusé de rembourser les frais vétérinaires ? La raison est simple : Eliana aurait dû contacter le vendeur au préalable. « La loi prévoit que le client doit revenir dans le magasin ou au minimum le contacter avant de consulter. Ce qui n’a pas été le cas », souligne la responsable.

Vous devez d’abord donner au vendeur la possibilité de faire soigner l’animal
SPF Économie

Une obligation confirmée par le SPF Économie : « Vous devez d’abord donner au vendeur la possibilité de faire soigner l’animal. Si vous vous adressez immédiatement à votre propre vétérinaire, sans avoir obtenu l’accord préalable du vendeur, vous perdez en principe vos droits à la garantie légale ».

Seule exception : l’urgence vitale

Il existe une exception à cette règle : l’urgence vitale. Une intervention immédiate est alors nécessaire pour la santé de l’animal. C’est l’argument avancé par la Bruxelloise. Mais cette affirmation est remise en question par l’animalerie. « Son vétérinaire aurait qualifié ça d’urgence, mais nous estimons que ce n’en est pas une. On a été informés après coup, sans marge de manœuvre ». « En cas de cryptorchidie, il y a un risque de développer une tumeur après quelques années. Il faut donc castrer l’année. Mais ce n’est pas une urgence », confirme Justine Sohier, vétérinaire.

De manière générale, la vétérinaire déplore le genre d’animaleries qui proposent d’acheter un animal en quelques clics. « Le souci, c’est que beaucoup de gens veulent un chiot ou un chaton immédiatement, comme si on le commandait sur Amazon ».

Pour éviter un problème éventuel, la vétérinaire recommande de bien choisir son éleveur. « Dans un élevage familial de qualité, il faut attendre une portée, que l’éleveur réalise une enquête familiale. On vérifie tout ce qui est héréditaire au niveau génétique. Un animal n’est pas utilisé comme reproducteur en cas de souci. L’éleveur ne reproduit qu’un chien sain », indique Justine Sohier.

Ensuite, l’acheteur réserve un chiot ou un chaton avant de venir le voir sur place. « C’est une démarche qui peut prendre des semaines, voire des mois. Contrairement à ces animaleries où un chiot est disponible tout de suite », souligne-t-elle.

Une enquête possible

Eliana a décidé de porter plainte auprès du conseil pour le bien-être animal flamand. Si elle estime que le vendeur ne respecte pas ses obligations légales en matière de garantie légale, la Bruxelloise peut également le signaler à l’Inspection économique du SPF Économie. « L’Inspection n’intervient pas dans les litiges individuels, mais peut, le cas échéant, ouvrir une enquête », précise Etienne Mignolet, porte-parole du SPF Économie.

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